Pour plein de bonnes raisons, il y a une mode Turing ces dernières années. Non seulement ses travaux ont été cachés pendant longtemps car ils relevaient du secret défense britannique, mais comme il avait été condamné pour homosexualité (le terme consacré était « Indécence manifeste », condamnation qui aura également affligé Oscar Wilde), on l’a d’autant plus mis en retrait. Finalement, il aura fallu une absolution royale pour qu’on puisse enfin prendre la mesure de celui qui a changé le cours de l’histoire en « craquant » le fameux code Enigma allemand. Autour de ce personnage qui est difficile à cerner, ce qui lui a valu un grand nombre d’inimitiés (il avait un côté asocial, inadapté à la conformité de la vie, en particulier telle qu’on l’entendait à l’époque) et surtout autour de son suicide, David Lagercrantz brode l’histoire d’un policier qui cherche à comprendre qui était Turing et quel avait été son rôle pendant la guerre. Par ailleurs, l’auteur s’attache à raconter la persécution des homosexuels, qui, en pleine guerre froide étaient considérés comme peu fiables et susceptibles de livrer des secrets d’état aux Russes. L’amalgame s’est amplifié lors de la fuite de deux espions homosexuels, mais la suspicion planait depuis les années 30, où, déjà mal vus, les homosexuels s’étaient rapprochés des doctrines communistes qu’ils pensaient plus ouvertes à la différence. La sentence était la prison ou la prise d’œstrogènes (quelle horreur !). Si vous voulez vous faire une idée de qui était ce mathématicien qui est à l’origine de l’intelligence artificielle (concept très difficile à appréhender dans les années 50), et d’une certaine manière de la révolution des mathématiques en tant que science vous trouverez votre compte dans ce livre que j’ai personnellement dévoré.
