Voilà un livre qui traînait depuis trop longtemps sur ma table de nuit et qui me faisait de l’œil de façon indécente malgré tout. Je me suis plongée dans cette histoire vierge de tout a priori et de toute information. Hormis la couverture, sublime (comme toujours aux forges de Vulcain), j’ignorais tout de ce roman.
Et j’ai été foudroyée par ces personnages, ces loosers magnifiques, cette Jolène qui ne s’appelle pas Jolène, qui est belle dans sa dignité retrouvée mais qui n’est pas belle si on s’arrête à ses traits, ce chanteur déchu, cet architecte véreux, ces anciens taulards, cet ouvrier à la retraite, ce boxeur qui a pris trop de coups dans le cerveau, ce jeune homme un peu simple d’esprit qui n’a que cette bande disparate comme famille, le tout tenu à bout de bras par le propriétaire de la pension où ils ont tous élu domicile.
L’ensemble est saupoudré subtilement d’une pointe de magie surréaliste et étrange, voire absurde. Gilles Marchand sait mettre du mouvement dans l’immobilisme le plus absolu, et de l’humour dans le tragique. On sent que ce roman social, qui défend les causes perdues monte en tension et on se doute, dès le titre et la première page que l’issue sera fatale. On sort de ce roman, un peu sonnés, en se disant qu’on ne laissera pas traîner le prochain roman de Gilles Marchand qui vient de sortir aussi longtemps sur sa table de nuit.
