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Les impatientes – Djaili Amal Amadou (240 pages)

Les lycéens ont décidément bon goût. Avec ce Goncourt, ils le démontrent une nouvelle fois. Rencontrée lors d’un VLEEL, Djaili Amal Amadou est la joie de vivre incarnée. Pourtant, dans son roman, elle nous explique que les filles n’ont pas voix au chapitre. Ce que pense une fille n’a aucune importance. Munyal munyal… Patience ma fille, patience. Voilà ce qu’on répète inlassablement aux filles Peules. Le poids de leur culture est terriblement pesant. La religion est venue ajouter sa couche. On brandit le Coran à tout bout de champ pour imposer la volonté des pères, des oncles, des frères sous couvert de la volonté d’Allah.Pour éviter à leurs mères d’être répudiées avec leurs enfants les plus petits, les filles se laissent marier à des hommes qu’elles n’ont pas choisi. L’hypocrisie et la trahison règnent en maître dans ces concessions. Les femmes attendent que leurs rivales tombent, elles ne se gênent pas pour leur faire des croche-pieds pour se mettre en avant et être la préférée de l’époux qu’on leur a choisi.

Au travers de trois destins bien différents (Ramla, la jolie adolescente qui veut devenir pharmacienne, Hindou, sa demi-soeur mariée le même jour à un cousin violent, bon à rien et buveur et Safira, la première épouse de l’homme qui a décidé de prendre Ramla en secondes noces), on verra que la patience a parfois des failles.

Personnellement, j’ai trouvé ce livre indispensable et terrifiant, même si son autrice a une telle foi en l’avenir et dans le rôle que les femmes ont à jouer qu’on doit l’aider à mettre en œuvre cette lueur d’espoir.

Frère d’âme – David Diop (142 pages)

J’avoue que cet ouvrage me laisse dubitative. D’une part, malgré sa brièveté, il est bourré de répétitions, si bien que si on enlève tous les « par la vérité de dieu », on retire un tiers du livre. Sans compter toutes les autres répétitions. Je suppose que l’auteur a souhaité par ce biais donner un rythme à son roman. Ou bien il a voulu qu’on sente que son personnage est un peu simple, ou il souligne ainsi sa folie ? L’histoire est pourtant forte, sur les tirailleurs sénégalais. Le héros, donc, devient fou à la mort de son ami. Quant à la fin, c’est pour moi obscur et j’avoue que je suis un peu passée à côté du message. Pour ma part, décevant.

D’après une histoire vraie- Delphine de Vigan (480 pages)

Je dois avouer que je n’aime pas tellement les livres de Delphine de Vigan. Il manque toujours ce petit quelque chose qui me ferait dire que c’est un excellent livre. Et ça m’ennuie pour plusieurs raisons : d’abord, je trouve qu’elle écrit très bien, son style fluide et rond nous emporte. Ensuite, elle a l’air sympathique et je n’aime pas critiquer les gens qui ont l’air sympa. Mais de No et moi aux heures souterraines et même rien ne s’oppose à la nuit, livre autobiographique, ne m’ont transportée. J’ai donc mis deux ans avant d’ entamer celui-ci . Compte tenu de la couverture, j’ai pensé que c’était une sorte de suite à son livre précédent. Je mettais mon manque d’intérêt à ses livres sur le compte de sa jeunesse. Est-ce la photo de sa mère, si belle, sur la couverture de rien ne s’oppose à la nuit, ou ses photomatons sur celui-ci ? Au bout de quelques pages, j’ai dû me rendre à l’évidence : ses enfants ayant sensiblement l’âge des miens, elle avait vraisemblablement à peu près mon âge. Je suis donc allée vérifier. Du coup, l’histoire du livre non abouti pour cause de jeunesse ne tenait pas.

Dès le début, on sait que l’histoire va être terrible. Dès le début, on a envie de protéger Delphine, on sait qu’elle est fragile, avec ce qu’elle a vécu dans son enfance, et plus encore depuis qu’elle a écrit sur sa mère. On a envie de lui dire que nous aussi on a flashé sur Ivan Lendl dans les années 80. Est-ce que toutes les ados pas très bien dans leur peau ont imaginé que ce type était accessible ? Moi qui jouais du piano à assez haut niveau et qui avais interdiction de toucher à une raquette de tennis, je suivais Roland Garros avec assiduité. On a envie d’être cette amie avec laquelle on aurait beaucoup d’affinités, mais en mieux, pas psychopathe. Du coup, à un moment, on se sent un peu L. Voyeur, intrusif on veut en savoir plus.

C’est vrai ou pas cette histoire ? Le roman se lit à plusieurs niveaux: le vrai le faux, la relation amicale, l’emprise mentale. Quand je suis allée me renseigner sur l’auteur sur internet, j’ai regardé ses photos. Il y a un passage dans le livre où elle explique que les photos sur internet, souvent retouchées ne lui ressemblent pas. On reste scotché du début à la fin, complètement absorbé par : c’est vrai ou c’est pas vrai ? Alors que tout le roman tourne autour de cette question. Doit-on écrire de la fiction ou des histoires vraies? Est-ce que le lecteur a besoin de cette vérité ? Bref, merci Cécile Mercier Adeline, de me l’avoir offert, en fait, il est génial ce bouquin, j’ai adoré.

Petit pays- Gaël Faye (218 pages)

Wahou! Un gros coup de poing, de foudre, de cœur ! Le génocide Rwandais et les événements qui l’ont précédé et ceux qui ont suivi, vus par les yeux d’un enfant. C’est super bien écrit et même si ce n’est pas un récit autobiographique, on sent qu’il y a du vécu dans ce petit bouquin.

L’amitié, la haine, la politique, la folie qui s’est emparé des hommes tout y est. On sort de là avec l’envie de pleurer et de vomir et on se rappelle avec soulagement qu’il fait bon vivre dans un pays comme le nôtre., et on espère que cela durera encore et encore. Gaël Faye est au départ un rappeur, lui aussi (voir Disiz), c’est peut-être ce qui lui donne ce sens de la formule. En tout cas, c’est vraiment un livre magnifique